"Je m’appelle Bernard Topo. Je viens de Bruxelles en 2027, via une application que j’ai développée pour communiquer avec un passé où se pressentait déjà l’omnipotence de la technologie (l’ardoise digitale est comme le prolongement de la main) et des réseaux sociaux (les Faceblokoeurs veillent sur nos rapports humains et les Gog+ surveillent nos agissements).
L’évolution ne s’y décline pas en révolution : les pouvoirs financiers sont suprapotents, la politique brille par son absence, les technocrates exécutent et seule l’existence personnelle pimente encore d’un brin d’humanité ce futur qui vous est proche. Si proche que vous pouvez vous y retrouver et à la fois si lointain qu’on peut envisager ce constat comme l’un des multiples avatars de l’Histoire."

mardi 17 avril 2012

coup de blues


Fin épisode précédent : « Ce soir, je ne suis cependant sûr que d’une chose : Juliana ne fera pas partie de mon avenir, en dépit de ses yeux magnifiques et de son art de vouloir s’en faire pardonner. » 

Episode 98. Dimanche 18 04 2027.  A mon avis, mes deux atouts principaux sont, primo, une relativement bonne pratique du français communicatif et, secundo, la maîtrise de divers langages de programmation. Mais parler avec les machines est finalement ce que je sais faire le mieux : mon entourage est si restreint que les contacts avec de vrais amis se comptent sur une main. Ne parlons pas de famille : je ne sais où est ma mère, mes papas-topos ont disparu et mon géniteur, sais-je seulement qui il est ? Mon ex-femme est décédée, mes amours sont aujourd’hui hygiéniques. D’ailleurs, je vis en seule compagnie d’une jeune fille encore gynoïde.

Assemblage laborieux de codes et siestes régénératrices partagent mes jours et mes nuits. Je vis en dehors du temps.
 
L’actualité m’intéresse dans ses grosses lignes, pas davantage ; de toute manière, de quelles informations peut-on disposer, sinon de celles que nos « amis » croient bon tartiner sur FaceBlok ?
Je n’ai ni curiosité ni passion particulière. La fiction m’ennuie. Une réflexion m’indispose. Manger et boire ne me sont pas compensatoires.

Cependant, que je m’attache à une machine et j’y resterai la semaine : « Un nerd confirmé, confiné, conforme ! » dirais-je, comme j’ai déjà eu l’occasion de l’entendre à mon sujet.
Quelques entorses toutefois, une courte balade d’un jour de ci de là, une rencontre de temps en temps. Je suis heureux, de toute évidence.
Je me suis forgé une bulle à force de solitude.
 
- Tu es triste ? me demande Lorrie, toute en empathie.
- Non. Je prends des décisions !
Chaleureuse, Lorrie l’est à l’occasion. L’éducation que je lui ai appliquée est sans faille. Mais elle est imparfaite comme une femme. Comme je le suis. Comme nous le sommes.
 
Il est grand temps que j’évolue.

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